Le récit

Alta Via dei Monti Liguri – La traversée Alpes ligures

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Jour 1 : Ventimiglia – Colle dei Saviglioni
5h25 | 18,0km | +1 280/-315m

Au petit matin, je quitte la France depuis Nice. Le quai et le train sont bondés comme un jour de grève, c’est le Grand Prix de Monaco ce week-end. Une fois l’État princier passé, je peux avoir une place assise et poser mon sac à dos. Vintimille terminus du train, ou Ventimiglia en italien, est à l’inverse pour moi, mon point de départ. J’apprendrai plus tard que mon train a été le dernier ce jour à franchir la frontière, une panne électrique bloquera les suivants. J’ai eu de la chance…

L’Alta Via dei Monti Liguri, soit la Haute Route des Monts Ligures, est un sentier de randonnée longue distance de 400 kilomètres qui traverse la région de la Ligurie. Il débute au bord de la mer Méditerranée, puis grimpe dans les montagnes pour traverser le massif des Alpes ligures et celui des Apennins ligures. Il est comme un trait d’union entre les chaînes des Alpes et des Apennins.

Ventimiglia et la Méditerranée

Il est presque 11 heures et je pars du niveau de la mer sous la chaleur du Sud, avec un beau dénivelé devant moi et un sac à dos chargé. J’ai 7 jours de nourriture et 3 litres d’eau. L’eau est rare sur l’itinéraire, je ne suis même pas sûr d’en trouver aujourd’hui. J’ai bien repéré l’ensemble des points d’eau lors de la préparation, mais ils ne sont pas tous fiables. Je vais devoir économiser.

Ça monte raide rapidement, le sentier surplombe Ventimiglia et offre une belle vue sur la Méditerranée. Il traverse quelques hameaux perchés avant de s’enfoncer dans les montagnes. Je profite de l’ombre des arbres à la chapelle Madonna della Neve, pour me poser à midi. Entre la reprise, le sac à dos qui pèse, la chaleur et la montée, je fatigue un peu. Je ne me plains pas, car depuis le début de mois de mai, il flotte, il pleut, il tombe des cordes… la météo n’est pas terrible et je m’attends à être saucé pendant cette semaine de randonnée.

Je suis rentré dans le parc régionale des Alpes ligures et pour l’instant, je n’ai pas croisé grand monde, en dehors de quelques cyclistes à VTT. Je passe la formation rocheuse de Terre Bianche, des vignes, des ruines de bunkers, des petits cols et bingo, je loupe l’unique potentiel point d’eau du jour. Ça commence bien. Il est 16 heures lorsque je m’arrête à une ancienne caserne militaire abandonnée. C’est grand et vide, peu accueillant quand on est seul. Mais le lieu peut servir d’abri. Il y a une pièce aménagée, avec une table, des chaises et miracle, de l’eau coule au robinet de la cuisine. Je reste là un moment à me reposer, pique du nez sur une chaise et j’hésite à m’installer pour la nuit. Il y de l’eau, c’est tout confort, mais une piste passe juste devant.

Finalement, je reprends la marche, il fait plus frais en cette fin de journée. J’espère ne pas le regretter, car depuis ce matin, je n’ai vu aucun coin pour pouvoir bivouaquer. Il y a beaucoup de forêt, de la pente et des pistes un peu partout. Heureusement, mon troisième miracle du jour se trouve peu après le col Colle dei Saviglioni. Une grande pâture, plate, située sur une hauteur qui dispose d’une vue panoramique, aussi bien vers l’Est que l’Ouest. J’aurai le soleil pour la soirée et au réveil !

Premier bivouac, près du Colle dei Saviglioni

Mon premier bivouaque de cette traversée est superbe. Je profite de la soirée et prends mon repas face aux lumières de fin de journée qui éclairent les montagnes. La nuit sera douce également.


Jour 2 : Colle dei Saviglioni – Passo della Valletta
7h10 | 27,0km | +1 480/-575m

Stop ! Ne pas bouger d’un chouilla… Les parois de mon abri sont trempées. J’ai opté pour un abri minimaliste, un mixte entre un tarp et une tente. Il s’agit d’une tente mono-paroi sur trois côtés et ventilée sur toute la partie basse ainsi que pour la quatrième paroi (la porte qui est tout en maille moustiquaire). C’est un abri simple, mais léger et qui protège bien de la pluie. Cependant, je n’avais pas prévu qu’en cette période de printemps, où l’herbe est haute, la rosée est importante et s’invite dans mon espace en pénétrant par le bas. Heureusement, le soleil est là, pour la sécher à minima, ainsi que mon sac de couchage, avant de reprendre la marche.

Panorama sur les Alpes ligures

Ce matin, je rentre dans la réserve transfrontalière de la Tête d’Alpe. Toute la journée, je vais marcher sur la frontière, en étant par moments en Italie et d’autres en France. De nombreuses bornes frontière longent l’itinéraire. Je croise aussi beaucoup d’anciennes infrastructures militaires à l’abandon ; casernes, bunkers… et le chemin est une ancienne piste militaire pavée de pierres. Il y a plusieurs refuges, dont certains sont d’anciennes casernes réaménagées. Malheureusement, ils sont fermés. Dans la forêt, j’aperçois un sanglier et des crottes de loup.

Finalement, non seulement je croise plus de points d’eau que prévu, mais en plus, l’eau coule. Comme le mois de mai a été très pluvieux sur l’Europe juste avant mon départ, les sources sont pleines. Si la tendance continue, je passerai de trois à deux litres d’eau.

Sentier en balcon

J’ai passé la barre des 1 000 mètres d’altitude juste après mon bivouac et le sentier continue de s’élever. La brume s’élève également. Je suis sur un petit sentier qui grimpe, en effectuant des serpentins, dans un paysage blanc. Puis, il perce la brume et je me retrouve au-dessus, lorsque j’arrive au col Passo Fonte Dragurina à 1 811 mètres d’altitude. Un paysage de haute-montage s’ouvre face à moi, avec un sentier accroché à la paroi qui domine le vide. Ce passage est de toute beauté, avec un lever d’une mer de nuage sur la ligne de crête.

Au col Passo della Valletta qui culmine à 1 900 mètres d’altitude, je me cherche un coin pour le bivouac. J’installe ma tente sur la frontière. Je pourrais dire comme Bernard des Bronzés dans le refuge franco-italien : « Je ne peux pas aller me coucher, j’ai pas mon passeport ». Ce soir, la vue est aussi belle que la veille et la température un peu plus fraîche, je suis tout de même 1000 mètres plus haut. Le calme règne en revanche, j’entends des cris dans les bois. J’identifie l’aboiement d’un chevreuil et un oiseau qui doit être un Geai des chênes.


Jour 3 : Passo della Valletta – Colla del Fieno
8h20 | 30,0km | +1 135/-1 730m

J’ai beau avoir dormi en altitude et par 8°C, ma tente est encore bien humide et il n’y a pas de soleil pour la sécher. Il va falloir gérer mieux cela les nuits prochaines.

L’itinéraire se poursuit sur la ligne de crête frontalière. Les panneaux à ma gauche sont écrits en français et ceux sur ma droite en italien. Plusieurs passages sont encore recouverts d’un peu de neige. C’est étonnant, car il fait relativement doux dans la région et la mer n’est qu’à une vingtaine de kilomètres à vol d’oiseau. Dans la matinée, je passe l’ancien complexe militaire situé au pied du sommet Cima Marta, un point défensif de la Seconde Guerre mondiale. Il se compose d’une caserne et de plusieurs bâtiments annexes, en ruine pour beaucoup. Certains semblent servir d’abri pour le bétail de la ferme d’à-côté.

Panneau en Français sur la frontière

Au col Passo di Collardente, se dresse juste en face une véritable forteresse, le Monte Saccarello. Avec ses 2 200 mètres d’altitude, il est le plus haut sommet de l’Alta Via dei Monti Liguri et de la Ligurie. Il n’est en revanche pas le point culminant des Alpes ligures qui est la Punta Marguareis avec ses 2 651 mètres d’altitude, mais elle est située dans la région du Piémont. À voir cet imposant sommet, je sens que la montée va être costaud. Il n’est pas loin en distance, mais je suis pour l’instant à 1 600 mètres d’altitude. J’aperçois également la statue du Christ Rédempteur qui commence à se faire manger par la brume. Les nuages montent, j’espère arriver au sommet avant eux.

Après une belle montée et quelques serpentins, j’arrive sur la ligne de crête. J’ai heureusement le temps d’admirer le panorama, avant que tout soit englouti par les nuages ; l’obélisque du Monte Saccarello, les ruines de la batterie de canons, la statue du Christ Rédempteur et sa chapelle. En m’éloignant du sommet, je m’éloigne définitivement de la France, cap vers l’Est maintenant. Je poursuis sur la ligne de crête dans une ambiance très blanche. J’aperçois un chamois et passe devant le refuge La Terza. Il est l’un des rares refuges gardés d’altitude de l’Alta Via dei Monti Liguri. Pas de chance pour moi, il ouvre qu’à partir du 1er juin, c’est-à-dire dans cinq jours. Les gardiens sont déjà là, je les vois effectuer quelques travaux avant de débuter la saison.

Le Christ Rédempteur

Je poursuis la marche sur une belle et grande ligne de crête brumeuse, d’où s’échappent quelques gouttes, jusqu’à la Cima Garlenda. Après ce sommet, le sentier prend la direction de la descente, vers un village. Au fur et à mesure que je perds de l’altitude, je m’enfonce dans la forêt et dans un brouillard de plus en plus dense et humide. À voir l’état du sol, en étant sur les hauteurs cet après-midi, j’ai échappé à une belle averse ici-bas.

J’atteins le col Colle San Bernardo di Mendatica où se trouve le village du même nom. Le sentier débouche au niveau de l’hôtel-restaurant San Bernardo. Sur sa porte, il est indiqué « fermé » dans au moins quatre langue différentes, il est fermé définitivement. Dans le brouillard épais, avec aucune circulation et personne dans les rues, aux volets des maisons fermés avec des jardins où la végétation retrouvée son instinct sauvage, j’ai l’impression d’être dans un village fantôme. J’avoue que j’aurai bien aimé trouver l’hôtel ouvert. Non seulement la météo n’est pas terrible, une averse peu tomber à tout moment, mais je sens surtout que je vais avoir du mal à trouver un coin pour bivouaquer. À cette altitude, 1 250 mètres, il y a beaucoup de forêt et je débute un tronçon qui va couper et longer la route pour un petit moment.

Il me faut poursuivre la marche pendant une heure et demie, pour trouver dans un virage d’une piste, un petit coin plat et dégagé dans la forêt. L’averse tombe un peu plus tard en soirée, j’aurai échappé à la pluie.


Jour 4 : Colla del Fieno – Rifugio Pian dell’Arma
3h50 | 14,0km | +550/-490m

Pour cette troisième nuit, j’ai enfin été opérationnel concernant la gestion de l’humidité. Avant de me coucher, j’ai essuyé les parois de la tente avec ma serviette. J’ai renouvelé l’opération lorsque je me suis réveillé cette nuit et au matin. En sécurité, j’avais enfilé ma veste de pluie autour de mes jambes et pieds pour ne pas risquer que le sac de couchage s’humidifie au contact de la tente. Je peux prendre mon petit déjeuner à l’intérieur, sans risquer de prendre une douche en même temps.

J’entame la journée avec un ciel est dégagé. L’itinéraire se poursuit dans une belle forêt où règne un jeu de lumière avec le soleil. J’entends Pics et Coucous, tandis que les écureuils grimpent aux arbres. Je n’ai rarement croisée aussi peu de monde lors d’une randonnée, j’ai l’impression d’être le seul être humain dans ces montagnes. Cela me va bien, ça me laisse entendre et observer la nature. J’arrive au village Colle di Nava, accolé à un ancien fort, où je fais une petite halte. Il y a un peu plus de vie ici que dans le village d’hier.

Le refuge Pian dell’Arma

Il est midi lorsque j’arrive au refuge Pian dell’Arma. Avec celui de La Terza, il est le seul refuge d’altitude de ma traversée. Lors de la préparation, j’avais vu qu’il ouvrait à partir de mi-mai, du mercredi au dimanche. Nous sommes mardi… Par chance, il est ouvert et je tenais à profiter d’un refuge pendant ma semaine. En plus, j’ai marché trop vite jusqu’à maintenant, j’ai de l’avance sur mon planning. Peu d’hésitation, je vais profiter des hamacs, des transats et de la douche chaude.

La gardienne sympathique m’indique qu’il y aura également un groupe de cycliste ce soir. Visiblement, je suis vraiment le seul randonneur des Alpes ligures. Le souper est copieux, à l’italienne avec un plat de pâtes en entrée. Ça me change des repas lyophilisés de ces derniers jours. Les cyclistes dormant en chambre, j’ai le dortoir rien que pour moi, je n’aurai pas besoin de boules quies. J’ai toujours une hantise de dormir en refuge, j’ai passé trop de nuits horribles à cause de ronfleurs aussi bruyant qu’un 747 au décollage.


Jour 5 : Rifugio Pian dell’Arma – Bric Schenasso
7h20 | 27,0km | +1 245/-1 505m

Je repars frais et propre pour attaquer ma seconde moitié de semaine. Le sentier gagne une nouvelle ligne de crête pour rejoindre le sommet Monte Armetta à 1 730 mètres d’altitude. Il offre un très beau panorama à 360 degrés. Je poursuis sur les hauteurs, l’occasion de retrouver la faune des montagnes, comme les chamois, et les fleurs d’altitude qui colorent le paysage en ce printemps.

Depuis le début, l’Alta Via dei Monti Liguri est bien balisée. Il y a de nombreux panneaux de direction et du balisage rouge-blanc-rouge marqué « AV », comme toutes les Hautes Routes (Alta Via) en Italie. En ce cinquième jour, mon sac à dos est considérablement allégé en nourriture et je transporte moins d’eau, un pur plaisir.

Panorama sur les hauteurs

Après le Monte Galero, j’arrive au bout de la ligne de crête, le sentier plonge dans la forêt pour aller rejoindre un nouveau petit col routier. Celui-ci s’appelle aussi San Bernardo, Colle San Bernardo di Garessio, et il est tout aussi fantôme que le village d’avant-hier. Il n’y a pas de hameau, simplement d’anciens bar-restaurants fermés, en ruines et tagués de partout. Il y a également un parc éolien et le sentier passe au pied même des éoliennes. C’est con, mais lorsque je passe sous les pales en mouvement, j’ai le réflexe de baisser la tête… Je crois que c’est la première fois que je passe aussi près d’éoliennes en fonctionnement, leurs hauteurs pourraient presque donner le vertige.

Je n’avais pas fait attention les premiers jours, mais il y a beaucoup de tiques à cette époque. J’en retire en quantité impressionnante. Elles sont toutes petites, voire microscopiques, à peine visible à l’œil. J’ai des morsures sur une bonne partie du corps. Je dois m’inspecter entièrement chaque soir, à la lampe frontale pour mieux les repérer. Il faut dire que dès que je suis sur un sentier, en zone dégagée ou en forêt, la végétation est haute en ce printemps et comme il n’y a pas foule, je suis leur seule proie. Heureusement, l’itinéraire empruntant régulièrement de larges chemins, des pistes forestières et d’anciennes pistes militaires, je suis tranquille sur ces portions-là.

L’après-midi se déroule principalement en sous-bois. Lorsque je me reposais au refuge hier, j’en ai profité pour consulter cartes et images satellites sur mon téléphone pour trouver des petits coins dégagés au milieu des forêts. J’ai repéré un spot potentiel peu avant le col Colle Scravaion, près d’un petit sommet nommé Bric Schenasso. Il s’agit d’une petite ligne de crête qui surplombe le vide, offrant ainsi une magnifique vue d’un côté, et de l’autre des arbustes vont me permettent de camoufler mon bivouac. Le terrain n’est pas très plat et deux éoliennes trônent sur ce belvédère. Je vois bien un peu plus loin un terrain plat, mais il y a du bétail et la piste coupe la pâture. Je préfère rester où je suis. Je serai bercé par le ronronnement des éoliennes et cela me fait une photo de bivouac assez originale.

Bivouac au Bric Schenasso

Jour 6 : Bric Schenasso – Rifugio Amici Del Carmo
3h45 | 15,0km | +820/-590m

La nuit fût plutôt bonne, le léger bruit des éoliennes ne m’a pas vraiment dérangé. J’étais bien placé pour avoir une mer de nuages. J’espérais en voir une au réveil, mais les nuages sont trop hauts, je suis dedans.

En chemin, un troupeau de chèvres arrive face à moi. Je pose mon sac à dos pour changer l’objectif de l’appareil photo. C’est là que je vois un Patou en tête de cortège. J’en aperçois un second, puis un troisième plus loin. Je me dépêche, mais je n’ai pas le temps de remettre mon sac à dos lorsque le premier arrive. Pas de panique, il balance à queue à tout va et il a l’air content de rencontrer un être humain. Chèvres et chiens me suivent sur un petit bout de chemin.

Panneau de randonnée italien

Lors des franchissements des petits cols routiers, je m’arrête aux abris à pique-nique. Je laisse passer les quelques gouttent de pluie qui peuvent tomber et repars. La matinée se faisant en forêt, je suis protégé de la brume humide.

J’arrive à la croix du sommet Monte Carmo dans le brouillard, aucune visibilité aucun panorama. Je bifurque vers le refuge du même nom, situé à une dizaine de minutes de là. C’est un refuge à clé, qu’il faut la récupérer en bas dans la vallée, mais il dispose d’une pièce en accès libre. Je m’attendais à une petite salle lugubre, voire sans fenêtre, mais c’est tout le contraire. C’est un grand réfectoire avec tables, bancs, poêle à bois et surtout, de grandes fenêtres donnant sur la mer, même si je ne la vois pas pour l’instant.
Il est 14 heures et je m’y installe. Comme j’ai toujours de l’avance dans mon planning et qu’il n’y a pas de visibilité, je préfère rester ici. Le ciel devrait être plus dégagé demain d’après les prévisions météo. En plus dans la pièce, il y a une photo du panorama qu’offrent le Monte Carmo et le refuge Amici Del Carmo. C’est splendide, je ne peux pas louper ça.

Dans le refuge

Je passe l’après-midi et la soirée seul dans la cabane, il n’y a personne dans ces montagnes. Les grands bancs me permettent, en les mettant côte à côte, de me faire un lit. Je pose mon matelas et sac de couchage dessus, face à la fenêtre.


Jour 7 : Rifugio Amici Del Carmo – Colla San Giacomo
5h15 | 25,0km | +675/-1 105m

Heureusement que j’ai passé la nuit au refuge. Cette nuit, ça a été le déluge et le vent a bien soufflé. Ce matin, le panorama est magnifique, je vois la mer ! Il reste des nuages dans le ciel, je m’attarde jusqu’à ce qu’ils se dissipent pour prendre une série de photo depuis le refuge, une petite colline adjacente et le sommet Monte Carmo. Avant de replonger en forêt, j’emprunte une petite variante par un petit sommet, le Bric dell’Agnellino à 1 335 mètres d’altitude. Il est mon dernier point haut, à partir de maintenant, je vais rester autour des 1 000 mètres et passer en dessous demain.

Panorama sur la mer Méditerranée

Comme chaque jour depuis le début, je croise des animaux, surtout des chevreuils. Ce qui change, c’est que je ne suis plus seul dans les bois. Ce matin, il y a beaucoup de vététistes. Leurs VTT tout suspendus sont imposants. Ils remontent par les pistes et empruntent pour la descente des sentiers taillés comme une piste de bobsleigh. À la montée, il y a ceux qui transpirent, ceux qui sont encore frais avec leur vélo électrique et il y a aussi des minibus avec une remorque comprenant une dizaine de vélos, qui remontent des groupes au point de départ des descentes. Je ne sais pas combien de cyclistes j’ai croisé aujourd’hui, mais il devait en avoir entre 100 et 200 !

Au hameau de Melogno, les trois restaurants ne sont pas fermés ou délabrés comme les précédents. Ils sont ouverts et font le plein avec les nombreux cyclistes. Après avoir hésité à m’arrêter, je continue mon chemin. Il y a trop de monde pour moi après cette semaine quasi solitaire. Je vais m’installer plus loin, sur le devant d’une chapelle où je peux faire une petite sieste tranquillement.

Vue sur la mer

Alors que j’arrive à la sortie d’une forêt, le ciel s’assombrit brusquement. Il fait presque nuit en sous-bois. Quelques instants plus tard, une averse de grêles tombe. J’ai juste le temps de mettre ma veste, mon surpantalon et de retourner m’abriter sous les branches des arbres. Un orage court avec un déluge de grêlons passe au-dessus de moi. Le sol est détrempé. Je profite d’une accalmie pour sortir et aller me réfugier dans une base désaffectée de l’OTAN située à la sortie de la forêt. Je ne suis pas le seul, dans les bâtiments tagués, il y a de nombreux vététistes qui patientent aussi. La base sert de point de départ, les agences amènent leurs clients ici.

Le ciel redevient bleu et je reprends la marche et rejoins le col Colla San Giacomo. Je m’installe à côté des tables à pique-nique et non loin se trouve une chapelle avec un point d’eau. Ce soir, je ne suis pas le seul, il y a deux couples de campeur avec une tente de toit sur leur véhicule qui sont également là.


Jour 8 : Colla San Giacomo – Bocchetta di Altare
3h15 | 14,0km | +330/-680m

Mes derniers kilomètres s’effectuent dans une brume matinale et dans les bois. Je sillonne sur un sentier tranquille, au calme, sans personne, à l’image de ce qu’a été cette semaine. Un dernier point de vue m’offre un panorama sur les Monts Ligures. Avant de descendre vers le village d’Altare, j’effectue le tour du vieux fort qui le domine sur les hauteurs. Il est entièrement pris par la végétation, on dirait une ville citée sud-américaine enfouie dans la jungle.

Au col Bocchetta di Altare, un menhir marque la jonction entre la chaîne des Alpes et celle des Apennins. Cette pierre dressée est un beau final pour cette randonnée. Ce col, aujourd’hui terminus des Alpes, me donne envie d’y revenir, pour être cette fois, le point de départ d’une randonnée à travers les Apennins.

L’obélisque entre Alpes et Apennins

Je rejoins ensuite la gare d’Altare pour prendre un train qui me ramène au bord de Méditerranée, à Savona. J’en profite pour visiter la ville et je rentrerai en France demain, en bus.